30 avr. 2015

"Nuit du psyché" dans la Note blanche...

Résultat de recherche d'images pour "la note blanche nuit du psyché"La "Nuit du psyché" : Les émissions From Town to Town, Zones d''Ondes Psychédéliques, la Note Blanche et son invité Gwendal Cadou vous feront vibrer pendant six heures ! Six heures où vous serez totalement immergés dans la musique psychédélique... Libérez vos âmes et vos consciences et vivez des expériences ultra-sensorielles grâce à une nuit ultra-délirante et entièrement dédiée à la musique psychédélique ! Nous partirons sur l'histoire du rock psychédélique des années 60/70 jusqu'aux années 2000, afin d'explorer toutes les couleurs musicales que le genre propose...


Retrouvez le podcast à télécharger en ligne sur le site :
http://radiocampusrennes.fr/emission/la-note-blanche/nuit-du-psyche-dans-la-note-blanche.html

OU téléchargez le podcast sur Mediafire (émission complète 6 heures) : 

http://www.mediafire.com/download/yti5usu5p5kf2rp/note150430.zip


"Nuit du Psyché": 


Pour introduire cette "Nuit du psyché", écoutez attentivement cette session spéciale Note blanche qui n'est évidemment qu'un bref aperçu de cette expérience nocturne. Je vous souhaite un bon voyage grâce aux groupes, Gong, The Wilde Flowers, Can, Fred Frith, Hendrix, Clouddead, The Olivia Tremor Control, Wooden Shjips, etc :

Liens Mediafire (Montage promo 9'00 ) : 

http://www.mediafire.com/listen/1jt13k6wc1lnka8/NoteNuitPsych%C3%A9.mp3#


Le psychédélisme est apparu au milieu des années 60 : 
Le rock psychédélique est un genre inspiré par l'usage de drogues hallucinogènes et notamment du LSD ( aussi appeler « acid rock »). Cette explosion multicolore et multi-sonore transcende l'esthétisme musical et libère les consciences. 

Né à San Francisco, le mouvement américain est caractérisé par une politique libertaire, qui dénonce la guerre du Vietnam et milite en faveur de l'émancipation des mœurs. Par ailleurs, le psychédélisme anglais, dont le cœur est le quartier Carnaby Street à Londres, se révèle plus pop et surtout plus empreint d'un onirisme inspiré des contes de Lewis Carroll comme Alice aux pays des merveilles par exemple ou de l'imaginaire métaphorique de William Blake, d'Aldous Huxley avec Les Portes de la perception . Au niveau musical, ce genre est particularisé par une construction rythmique hypnotique, souvent humoristique,des mélodies répétitives et pénétrantes, des solos instrumentaux longs et tortueux, modelés d'effets sonores tels que la wah-wah et la distorsion, le tout dans des morceaux généralement assez longs. 

L'origine du mot « psyché » : 
Son origine provient et prend un véritable sens grâce à une correspondance entre le psychiatre H. Osmond et l'écrivain A . Huxley. Du grec Psyché, âme et delein, visible, les deux hommes ont parlé d'un état qui rendrait « l'âme visible, manifeste ». De plus, Timothy Leary, écrivain, scientifique et psychologue, prônait l'utilisation scientifique des psychédéliques. Son célèbre slogan « Come together, join party » sera repris par les Beatles dans leur célèbre titre « Come together ». En effet, son influence dans le monde du psychédélisme sera majeure puisque ce dernier a inspiré de nombreux talents comme John Lennon, Jimi Hendrix Are you experienced, l'écrivain Aldous Huxley, etc. Enfin, cet homme revendiquait l'expérience sensorielle, mystique et spirituelle, notamment par le biais du LSD, du voyage astral, de la méditation, etc. Ses méthodes controversées ont largement nourris le mouvement psyché et correspondent à l'état d'esprit recherché par les artistes. 

Pour résumé, le psychédélisme cherche à provoquer un état physique et spirituel :
Le mouvement illustre l'état d'esprit des années 60 avec la libération des droits, de la morale, les différents événements politiques à travers le monde, la guerre du Vietnam, etc. Enfin l'art pictural s'exprime surtout grâce aux affiches. Inspiré de l'Art nouveau, le psychédélisme décrit un état de rêve éveillé obtenu grâce à des expériences hallucinogènes ce qui explique que les images psychédéliques renvoient aux hallucinations, à un paradis terrestre dans un monde de rêve. Ce mouvement mondial débouche sur une nouvelle philosophie de la vie : avec la recherche de la liberté, de spiritualité ou de l'amour... ! Mais entraîne aussi à la consommation de drogues comme moyen de libération..L'Art Psychédélique est agressif à première vue. Nous y trouvons des couleurs très vives, très contrastées, multicolores, discordantes et acidulées. Il est contemporain du Pop Art. 

Revenons-en à la musique, au rock psychédélique et à ses variantes :
Tout d'abord, comment reconnaître ce genre ? Comme je l'ai dit plus haut, le psychédélisme intervient en 1965, en réaction à l'interdiction du LSD ! Les musiciens revendiquent dans leur texte et dans leur son, une nouvelle conscience ainsi qu'une nouvelle façon de ressentir les événements : la musique devient une expérience sensorielle ! 

De plus, le rock psychédélique débouche sur plusieurs écoles. En 1963, plusieurs musiciens formant les groupes Soft Machine, Gong, Caravan ou Hatfield and the North, s'inspirent des contes de Canterbury rédigés par Geoffrey Chaucer au 14ème siècle pour fonder leur propre genre musical en y incorporant des harmonies plus complexes au rock, des improvisations variées....... 

D'après une définition de Stéphane Delorme dans les Cahiers du cinéma : « Le psychédélisme n'est pas un folklore, c'est une révolution » ; « Pourquoi y revenir aujourd'hui ? D'abord parce que le mot revient par le rock, et que l'époque semble en avoir diablement besoin (…) Parce qu'ils (les artistes), envisagent le récit comme un voyage au fond de l'inconnu, parce qu'ils ont la fièvre, qu'ils sont hallucinés et nous placent dans un état second » 

Programme et présentation des émissions : 
Suite à ce petit récapitulatif sur l'histoire du psychédélisme revenons à l'essentiel c'est-à-dire au programme pour ce soir ! Tout d'abord, la Note blanche présentera la première partie de la période psyché en vous immergeant dans le rock psychédélique des années 60/70. Son invité Gwendal Cadou, poursuivra avec l'univers singulier ambient/rock/expérimental des années 80/90 ! Et en deuxième partie, Zone d'ondes psychédéliques fera le tour du monde grâce à des sons divers et variés que propose le genre psyché à travers toute la planète ! Et enfin, From town to town propulsera la machine psychédélique dans les années 2000 et vous feront découvrir les sonorités psychés actuelles.

Commençons dès à présent notre Nuit du psyché avec les ancêtres du genre : le groupe Caravan ! La Note blanche vous propose une première session qui sera d'abord consacrée aux groupes qui ont composé la première école du psychédélisme anglais : le Canterbury ! Vous retrouverez dans les morceaux toutes les légendes du rock psychédélique, dont entre autre Robert Wyatt, Kevin Ayers, Brian Hopper, Hugh Hopper et Richard Sinclair...


Retrouvez le podcast à télécharger en ligne sur le site :
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OU téléchargez le podcast sur mediafire (émission complète 6 heures) : 

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Présentation émission "Nuit du Psyché" (montage promo) : Pour introduire cette "Nuit du psyché", écoutez attentivement cette session spéciale Note blanche qui n'est évidemment qu'un bref aperçu de cette expérience nocturne. Je vous souhaite un bon voyage grâce aux groupes, Gong, The Wilde Flowers, Can, Fred Frith, Hendrix, Clouddead, The Olivia Tremor Control, Wooden Shjips, etc :

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Extraits : 


 
 
 
 
 




 ETC !!

26 avr. 2015

Le jazz, ses influences et ses génies dans la Note blanche (Partie 2)

La Note blanche est de retour sur les ondes pour de nouvelles envolées musicales ! Et pour cette heure dominicale, nous aborderons le deuxième volet de l'histoire du free jazz/rock en nous concentrant sur les grands génies de l'époque. Nous commencerons cette émission par le plus important et incontournable représentant du mouvement : John Coltrane...

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Ecoutez l'émission en podcast sur le site : 

John Coltrane, saxophoniste ténor, a grandit à High Point en Caroline du Nord, et s'essaya à différents types de cuivres pendant son adolescence. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, Coltrane joua dans un orchestre de la Marine à Hawaï. Bien qu'il ait par la suite engagé une véritable révolution dans le jazz en explorant toutes ses possibilités musicales et spirituelles, ses débuts furent tout à fait classiques car il débuta sa carrière en jouant dans les groupes de rhythm & blues et de jazz grâce à King Kolax, Jimmy Heath, Howard McGhee, Dizzy Gillespie et Earl Bostic.

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En revanche, John Coltrane débuta ses expérimentations après avoir rejoint le quintette de Miles Davis pour l'album Kind of blue en 1959. Sur ce disque, les solos de Coltrane commencèrent à se libérer de la tradition jazz. En effet, ses improvisations sont énormément nourris par son imagination. Alors que le musicien n'utilise que trois ou quatre accords, son saxophone produit des sons exotiques qui deviendront plus tard sa marque de fabrique. Parmi ses caractéristiques, nous pouvons justement citer des solos aériens qui s'affranchissent des règles de l'improvisation en utilisant seulement un petit nombre d'accords et de gammes. C'est ainsi que Coltrane parvient à improviser beaucoup plus longtemps que les autres musiciens. De plus, le saxophoniste intègre à son jeu le jazz modal. Par conséquent, Coltrane adopta progressivement une approche méditative inspirée par la musique de Ravi Shankar et de l'Inde en général. Ainsi, il écrivit des morceaux qui reposaient sur une seule gamme ou un seul mode au lieu de recourir à d'innombrables changements de modalité. Cela donna plus de liberté aux musiciens pendant leurs improvisations, car ils pouvaient se concentrer sur leurs émotions au lieu de penser à suivre des changements incessants de tonalité ou de mode.


Dans sa musique et dans sa vie, Coltrane se livra à une quête spirituelle qui devint de plus en plus importante au fil des années. Il étudia les religions et la musique orientale. Pour le saxophoniste, la musique était devenue une prière ou, en d'autres termes, une offrande à Dieu. Par ailleurs, il n'est pas étonnant que l'on trouve un église dédiée à John Coltrane à San Francisco ! Le titre phare et faramineux, A Love Supreme sorti en 1964, marque les débuts de sa période spirituelle. L'atmosphère est méditative, et ses improvisations ne suivent aucune règle harmonique ou mélodique. Enfin, vers la fin de sa carrière, Coltrane abandonna presque toute structure dans ses morceaux, qui ne reposaient plus que sur l'exploration d'une émotion. Par la suite, il adopta le saxophone soprano qui est par conséquent mieux adapté que le ténor à un jeu chargé en émotions. Le pouvoir de sa musique tient aussi au fait qu'il sut rester exigeant esthétiquement tout en réalisant des albums qui plaisaient au grand public sûrement parce qu'il touchait quelque-chose de profondément universel...

 
 
 

21 avr. 2015

Lettre d’Antonin Artaud à Colette Thomas

Colette Thomas épousa le romancier Henri Thomas et par lui fit la rencontre de la personnalité à la fois captivante et redoutable d’Antonin Artaud. Comédienne jusqu’alors restée dans l’ombre elle sera selon Artaud : « la plus grande actrice que le théâtre ait vue ». Les rapports d’Artaud avec les femmes ont toujours été complexes. Jeune acteur, d’une beauté rayonnante, il vivra des aventures sans lendemains du temps de la courte vie du Théâtre de la Cruauté, mais Colette Thomas surgira alors qu’il est aux bords de sa mort, vieillard éructant, porté par une gloire sulfureuse et lui-même enfermé dans une virulente haine du sexe et comme frappé d’un esprit d’inquisiteur. Colette ne pouvait qu’être une de « ses filles de cœur ».

artaud
"Vous êtes une fleur unique que le monde ne veut
pas laisser vivre"



3 juin 1946

Chère Colette,

Disant publiquement que les enfants de la mise en scène princpe ne sont pas dans le son mais dans le con, vous ne serez pas une actrice mais la plus grande amie de mon âme désireuse de manifester et d’imposer l’un de mes élans de cœur, à tous.

Ce qui nous empêche de vivre, vous et moi, c’est la masse, et elle recule comme Béémoth devant la manifestation plus massive qu’elle de certaines vérités. —

Ne rien faire, ne plus quitter Saint-Germain, c’est se laisser enliser par elle, la masse, et se laisser pénétrer par son insuline, c’est se faire faire sans le savoir une cure d’insulinothérapie.

Y a-t-il beaucoup d’êtres au monde, Colette, qui tiennent à vous de toute leur âme et qui veulent que votre moi et votre personnalité existent, je ne le crois pas et je crois que votre mère est au fond et en fait votre ennemie, il fautchoisir entre vos parents et moi.

Je vous ai dit que je m’enfermerai dans ma tour abolie parce que vous m’avez désespéré avec de faux prétextes pour ne pas rester avec moi pour travailler aujourd’hui.

Vous êtes une fleur unique que le monde ne veut pas laisser vivre.

Je crois avoir perçu cette fleur telle qu’elle est et pour rien au monde je ne voudrais la léser physiquement ou moralement, mais cette fleur a besoin de moi, et on le sait et on voudrait bien l’enlever de mon atmosphère pour me désespérer et la désespérer d’échapper au conformisme général : famille : société :

« Tu resteras incluse ailleurs que dans tout ce qui est Artaud ».

Colette, il faut réagir à tout instant et à tout prix.

Je vous embrasse.

ANTONIN ARTAUD

15 avr. 2015

Lettre d’Arthur Rimbaud à Paul Demeny, dite lettre du « voyant »

Arthur Rimbaud, né le 20 octobre 1854, est passé comme un météore sur cette terre, bouleversant à jamais la littérature par sa poésie convulsive et sublime, sa folle destinée, ses amours tabous, sa fuite en Afrique… Incarnation de la révolte absolue, maître de la langue, il fut un génie précoce qui, comme Mozart ou Picasso, révolutionna radicalement son art. A l’âge de 17 ans, avant de conquérir Paris et d’écrire les deux recueils qui lui assureront une gloire éternelle (Illuminations et Une saison en enfer), Rimbaud adresse en pleine Commune cette lettre au poète Paul Demeny, œuvre et programme poétique définitifs.

rimbaud
"Je est un autre"


15 mai 1871

À Douai.

Charleville, 15 mai 1871.

J’ai résolu de vous donner une heure de littérature nouvelle. Je commence de suite par un psaume d’actualité :

CHANT DE GUERRE PARISIEN

Le Printemps est évident, car

Du cœur des Propriétés vertes

Le vol de Thiers et de Picard

Tient ses splendeurs grandes ouvertes.

Ô mai ! Quels délirants cul-nus !

Sèvres, Meudon, Bagneux, Asnières,

Écoutez donc les bienvenus

Semer les choses printanières !

Ils ont schako, sabre et tamtam

Non la vieille boîte à bougies

Et des yoles qui n’ont jam…jam…

Fendent le lac aux eaux rougies !…

Plus que jamais nous bambochons

Quand arrivent sur nos tanières

Crouler les jaunes cabochons

Dans des aubes particulières.

Thiers et Picard sont des Éros

Des enleveurs d’héliotropes

Au pétrole ils font des Corots.

Voici hannetonner leurs tropes…

Ils sont familiers du grand truc !…

Et couché dans les glaïeuls, Favre,

Fait son cillement aqueduc

Et ses reniflements à poivre !

La Grand-Ville a le pavé chaud

Malgré vos douches de pétrole

Et décidément il nous faut

Nous secouer dans votre rôle…

Et les ruraux qui se prélassent

Dans de longs accroupissements

Entendront des rameaux qui cassent

Parmi les rouges froissements.

— Voici de la prose sur l’avenir de la poésie – Toute poésie antique aboutit à la poésie grecque ; Vie harmonieuse. — De la Grèce au mouvement romantique, — moyen-âge, — il y a des lettrés, des versificateurs. D’Ennius à Théroldus, de Théroldus à Casimir Delavigne, tout est prose rimée, un jeu, avachissement et gloire d’innombrables générations idiotes : Racine est le pur, le fort, le grand. — On eût soufflé sur ses rimes, brouillé ses hémistiches, que le Divin Sot serait aujourd’hui aussi ignoré que le premier venu auteur d’Origines. — Après Racine, le jeu moisit. Il a duré deux mille ans!

Ni plaisanterie, ni paradoxe. La raison m’inspire plus de certitudes sur le sujet que n’aurait jamais eu de colères un jeune-France. Du reste, libre aux nouveaux ! d’exécrer les ancêtres : on est chez soi et l’on a le temps.

On n’a jamais bien jugé le romantisme ; qui l’aurait jugé ? les critiques !! Les romantiques, qui prouvent si bien que la chanson est si peu souvent l’œuvre, c’est-à-dire la pensée chantée et comprise du chanteur ?

Car Je est un autre. Si le cuivre s’éveille clairon, il n’y a rien de sa faute. Cela m’est évident : j’assiste à l’éclosion de ma pensée : je la regarde, je l’écoute : je lance un coup d’archet : la symphonie fait son remuement dans les profondeurs, ou vient d’un bond sur la scène.

Si les vieux imbéciles n’avaient pas trouvé du Moi que la signification fausse, nous n’aurions pas à balayer ces millions de squelettes qui, depuis un temps infini, ! ont accumulé les produits de leur intelligence borgnesse, en s’en clamant les auteurs !

En Grèce, ai-je dit, vers et lyres rythment l’Action. Après, musique et rimes sont jeux, délassements. L’étude de ce passé charme les curieux : plusieurs s’éjouissent à renouveler ces antiquités : — c’est pour eux. L’intelligence universelle a toujours jeté ses idées, naturellement ; les hommes ramassaient une partie de ces fruits du cerveau : on agissait par, on en écrivait des livres : telle allait la marche, l’homme ne se travaillant pas, n’étant pas encore éveillé, ou pas encore dans la plénitude du grand songe. Des fonctionnaires, des écrivains : auteur, créateur, poète, cet homme n’a jamais existé !

La première étude de l’homme qui veut être poète est sa propre connaissance, entière ; il cherche son âme, il l’inspecte, il la tente, l’apprend. Dès qu’il la sait, il doit la cultiver ; cela semble simple : en tout cerveau s’accomplit un développement naturel ; tant d’égoïstes se proclament auteurs ; il en est bien d’autres qui s’attribuent leur progrès intellectuel ! — Mais il s’agit de faire l’âme monstrueuse : à l’instar des comprachicos, quoi ! Imaginez un homme s’implantant et se cultivant des verrues sur le visage.

Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant.

Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes les formes d’amour, de souffrance, de folie ; il cherche lui-même, il épuise en lui tous les poisons, pour n’en garder que les quintessences. Ineffable torture où il a besoin de toute la foi, de toute la force surhumaine, où il devient entre tous le grand malade, le grand criminel, le grand maudit, — et le suprême Savant — Car il arrive à l’inconnu ! Puisqu’il a cultivé son âme, déjà riche, plus qu’aucun ! Il arrive à l’inconnu, et quand, affolé, il finirait par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues ! Qu’il crève dans son bondissement par les choses inouïes et innombrables : viendront d’autres horribles travailleurs ; ils commenceront par les horizons où l’autre s’est affaissé !

— la suite à six minutes –

Ici j’intercale un second psaume, hors du texte : veuillez tendre une oreille complaisante, — et tout le monde sera charmé. — J’ai l’archet en main, je commence :

MES PETITES AMOUREUSES

Un hydrolat lacrymal lave

Les cieux vert-chou :

Sous l’arbre tendronnier qui bave,

Vos caoutchoucs.

Blancs de lunes particulières

Aux pialats ronds,

Entrechoquez vos genouillères,

Mes laiderons !

Nous nous aimions à cette époque,

Bleu laideron :

On mangeait des œufs à la coque

Et du mouron !

Un soir, tu me sacras poète,

Blond laideron.

Descends ici que je te fouette

En mon giron ;

J’ai dégueulé ta bandoline

Noir laideron ;

Tu couperais ma mandoline

Au fil du front.

Pouah ! mes salives desséchées

Roux laideron,

Infectent encor les tranchées

De ton sein rond !

Ô mes petites amoureuses,

Que je vous haïs !

Plaquez de fouffes douloureuses,

Vos tétons laids !

Piétinez mes vieilles terrines

De sentiment ;

Hop donc soyez-moi ballerines

Pour un moment !…

Vos omoplates se déboîtent,

Ô mes amours !

Une étoile à vos reins qui boitent

Tournez vos tours.

Et c’est pourtant pour ces éclanches

Que j’ai rimé !

Je voudrais vous casser les hanches

D’avoir aimé !

Fade amas d’étoiles ratées,

Comblez les coins

— Vous creverez en Dieu, bâtées

D’ignobles soins !

Sous les lunes particulières

Aux pialats ronds

Entrechoquez vos genouillères,

Mes laiderons !

Voilà. Et remarquez bien que, si je ne craignais de vous faire débourser plus de 60 c. de port, — Moi pauvre effaré qui, depuis sept mois, n’ai pas tenu un seul rond de bronze ! — je vous livrerais encore mes Amants de Paris, cent hexamètres, Monsieur, et ma Mort de Paris, deux cents hexamètres ! — Je reprends :

Donc le poète est vraiment voleur de feu.

Il est chargé de l’humanité, des animaux même ; il devra faire sentir, palper, écouter ses inventions ; si ce qu’il rapporte de là-bas a forme, il donne forme : si c’est informe, il donne de l’informe. Trouver une langue ;

— Du reste, toute parole étant idée, le temps d’un langage universel viendra ! Il faut être académicien, — plus mort qu’un fossile, — pour parfaire un dictionnaire, de quelque langue que ce soit. Des faibles se mettraient à penser sur la première lettre de l’alphabet, qui pourraient vite ruer dans la folie !-

Cette langue sera de l’âme pour l’âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la pensée accrochant la pensée et tirant. Le poète définirait la quantité d’inconnu s’éveillant en son temps dans l’âme universelle : il donnerait plus — (que la formule de sa pensée, que la notation de sa marche au Progrès ! Enormité devenant norme, absorbée par tous, il serait vraiment un multiplicateur de progrès !

Cet avenir sera matérialiste, vous le voyez ; — Toujours pleins du Nombre et de l’Harmonie ces poèmes seront faits pour rester. — Au fond, ce serait encore un peu la Poésie grecque. L’art éternel aurait ses fonctions ; comme les poètes sont citoyens. La Poésie ne rhythmera plus l’action, elle sera en avant.

Ces poètes seront ! Quand sera brisé l’infini servage de la femme, quand elle vivra pour elle et par elle, l’homme, jusqu’ici abominable, — lui ayant donné son renvoi, elle sera poète, elle aussi ! La femme trouvera de l’inconnu ! Ses mondes d’idées différeront-ils des nôtres ? — Elle trouvera des choses étranges, insondables, repoussantes, délicieuses ; nous les prendrons, nous les comprendrons.

En attendant, demandons aux poètes du nouveau, — idées et formes. Tous les habiles croiraient bientôt avoir satisfait à cette demande. — Ce n’est pas cela !

Les premiers romantiques ont été voyants sans trop bien s’en rendre compte : la culture de leurs âmes s’est commencée aux accidents : locomotives abandonnées, mais brûlantes, que prennent quelque temps les rails. — Lamartine est quelquefois voyant, mais étranglé par la forme vieille. — Hugo, trop cabochard, a bien du vu dans les derniers volumes : Les Misérables sont un vrai poème. J’ai Les Châtiments sous la main ; Stella donne à peu près la mesure de la vue de Hugo. Trop de Belmontet et de Lamennais, de Jéhovahs et de colonnes, vieilles énormités crevées.

Musset est quatorze fois exécrable pour nous, générations douloureuses et prises de visions, — que sa paresse d’ange a insultées ! Ô ! les contes et les proverbes fadasses ! Ô les nuits ! Ô Rolla, Ô Namouna, Ô la Coupe ! Tout est français, c’est-à-dire haïssable au suprême degré ; français, pas parisien ! Encore une œuvre de cet odieux génie qui a inspiré Rabelais, Voltaire, jean La Fontaine, ! commenté par M. Taine ! Printanier, l’esprit de Musset ! Charmant, son amour ! En voilà, de la peinture à l’émail, de la poésie solide ! On savourera longtemps la poésie française, mais en France. Tout garçon épicier est en mesure de débobiner une apostrophe Rollaque, tout séminariste en porte les cinq cents rimes dans le secret d’un carnet. A quinze ans, ces élans de passion mettent les jeunes en rut ; à seize ans, ils se contentent déjà de les réciter avec cœur ; à dix-huit ans, à dix-sept même, tout collégien qui a le moyen, fait le Rolla, écrit un Rolla ! Quelques-uns en meurent peut-être encore. Musset n’a rien su faire : il y avait des visions derrière la gaze des rideaux : il a fermé les yeux. Français, panadif, traîné de l’estaminet au pupitre de collège, le beau mort est mort, et, désormais, ne nous donnons même plus la peine de le réveiller par nos abominations !

Les seconds romantiques sont très voyants : Th. Gautier, Lec. de Lisle, Th. de Banville. Mais inspecter l’invisible et entendre l’inouï étant autre chose que reprendre l’esprit des choses mortes, Baudelaire est le premier voyant, roi des poètes, un vrai Dieu. Encore a-t-il vécu dans un milieu trop artiste ; et la forme si vantée en lui est mesquine — les inventions d’inconnu réclament des formes nouvelles.

Rompue aux formes vieilles, parmi les innocents, A. Renaud, — a fait son Rolla, — L. Grandet, — a fait son Rolla ; — les gaulois et les Musset, G. Lafenestre, Coran, CI. Popelin, Soulary, L. Salles ; les écoliers, Marc, Aicard, Theuriet ; les morts et les imbéciles, Autran, Barbier, L. Pichat, Lemoyne, les Deschamps, les Desessarts ; les journalistes, L. Cladel, Robert Luzarches, X. de Ricard ; les fantaisistes, C. Mendès ; les bohèmes ; les femmes ; les talents, Léon Dierx, Sully-Prudhomme, Coppée, — la nouvelle école, dite parnassienne, a deux voyants, Albert Mérat et Paul Verlaine, un vrai poète. — Voilà. — Ainsi je travaille à me rendre voyant. –

Et finissons par un chant pieux.

ACCROUPISSEMENTS

Bien tard, quand il se sent l’estomac écœuré,

Le frère Milotus un œil à la lucarne

D’où le soleil, clair comme un chaudron récuré,

Lui darde une migraine et fait son regard darne,

Déplace dans les draps son ventre de curé.

Il se démène sous sa couverture grise

Et descend ses genoux à son ventre tremblant,

Effaré comme un vieux qui mangerait sa prise,

Car il lui faut, le poing à l’anse d’un pot blanc,

À ses reins largement retrousser sa chemise !

Or, il s’est accroupi frileux, les doigts de pied

Repliés grelottant au clair soleil qui plaque

Des jaunes de brioches aux vitres de papiers,

Et le nez du bonhomme où s’allume la laque

Renifle aux rayons, tel qu’un charnel polypier.

Le bonhomme mijote au feu, bras tordus, lippe

Au ventre : il sent glisser ses cuisses dans le feu

Et ses chausses roussir et s’éteindre sa pipe ;

Quelque chose comme un oiseau remue un peu

À son ventre serein comme un monceau de tripe !

Autour, dort un fouillis de meubles abrutis

Dans des haillons de crasse et sur de sales ventres,

Des escabeaux, crapauds étranges, sont blottis

Aux coins noirs : des buffets ont des gueules de chantres

Qu’entr’ouvre un sommeil plein d’horribles appétits.

L’écœurante chaleur gorge la chambre étroite,

Le cerveau du bonhomme est bourré de chiffons,

Il écoute les poils pousser dans sa peau moite

Et parfois en hoquets fort gravement bouffons

S’échappe, secouant son escabeau qui boite…

Et le soir, aux rayons de lune qui lui font

Aux contours du cul des bavures de lumière,

Une ombre avec détails s’accroupit sur un fond

De neige rose ainsi qu’une rose trémière…

Fantasque, un nez poursuit Vénus au ciel profond.

Vous seriez exécrable de ne pas répondre : vite car dans huit jours je serai à Paris, peut-être.

Au revoir,

A. Rimbaud.

9 avr. 2015

Valerie and Her Week of Wonders (1970)

Valérie au pays des merveilles (titre original : Valerie a týden divů ou Valerie and Her Week of Wonders) est un film tchécoslovaque réalisé par Jaromil Jireš en 1970, adapté du roman Valérie ou la semaine des merveilles de Vítězslav Nezval, écrit en 1935.

 

Synopsis :

 

Valérie, jeune orpheline de 13 ans vivant seule avec sa grand-mère, vit dans un rêve désorientant où elle est séduite par des prêtres, des vampires, des hommes et des femmes confondus.

  • Titre : Valérie au pays des merveilles
  • Titre original : Valerie a týden divů
  • Réalisateur : Jaromil Jireš
  • Scénario : Vítězslav Nezval (roman), Ester Krumbachová, Jaromil Jireš et Jirí Musil
  • Format : Couleurs
  • Durée : 77 minutes
  • Date de sortie : 1970
  • Pays : Tchécoslovaquie

Jaroslava Schallerová : Valerie
Helena Anýzová : Babicka / Elsa / Matka / Rusovláska
Petr Kopriva : Orlík
Jirí Prýmek : Tchor-konstàbl
Jan Klusák : Gracián


Broadcast Valerie (trailer), Warp records, 2003 :



Galerie : 



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Night Things, Sleeping Beauty (trailer 2), 2013 :

 

5 avr. 2015

"Impressions" de Laura Perrudin

La Note blanche est de retour sur les ondes pour accueillir Laura Perrudin afin de découvrir son album Impressions...


Retrouvez et écoutez l'émission en podcast sur le site : 

Ou sur Soundcloud : 

Le parcours de la jeune harpiste et chanteuse rennaise Laura Perrudin est aussi hors du commun qu'électrique. Nourrie par le jazz depuis son enfance, elle étudie longuement la musique classique tout en s'intéressant très tôt aux musiques électroniques et traditionnelles, à la soul et au hip-hop. Laura se forma auprès de nombreux musiciens aussi bien dans sa Bretagne natale qu'à Paris ou même à New-York ! La musicienne cherche à ouvrir les possibilités de la harpe à un langage harmonique plus riche. Finalement, elle trouve enfin la clef en 2008 grâce au luthier Philippe Volant qui lui construit une harpe chromatique à cordes alignées. C'est par le biais de cet instrument naissant et singulier, que Laura donne aujourd'hui la vie aux harmonies sinueuses de ses compositions inclassables.

Interview : Impressions de Laura Perrudin dans la Note blancheAlbum Impressions, un talentueux mélange d'acoustique et d'électro : 

"J'ai grandi dans un environnement où le jazz a toujours occupé une place centrale jusque dans mes études classiques au conservatoire, et il s'est vite imposé comme une sorte de fondation dans la construction d'un langage musical multiculturel nourri d'une multitudes d'influences, incluant les musiques électroniques, le hip-hop, la soul, les musiques traditionnelles et classiques de différentes régions du monde".

Dans l'univers solitaire de la composition, l'instrument entre également en correspondance avec la voix dont il se veut le prolongement : "Aussi mon travail d'arrangement a-t-il porté sur cette relation vocal/instrument qui est au cœur de mon travail, mais j'y ai aussi exploré une correspondance qui me poursuit depuis longtemps, celle entre le monde "réel", "palpable", des instruments acoustiques et le monde parallèle et virtuel des machines que j'ai voulu faire dialoguer".

Musiques et couleurs :

"S'il existe de nombreuses correspondances entre ces univers musicaux constitutifs de l'identité artistique plurielle dont se premier disque est le reflet, le mot "correspondance", fonctionnant ici comme un fil rouge, se rapporte à plusieurs autres déclencheurs de la musique qui s'y trouve rassemblée, les plus tangibles étant de l'ordre "intersensoriel" ou "synésthésique" (...) Les compositions présentes sur ce disque retracent ainsi presque sept ans de ma vie au cours desquels une progressive décantation de cette sensation a abouti à un « code » de correspondances note/couleur/élément, aussi précis qu'inexplicable. Il m’est apparu que le Si est jaune (la lumière), le Fa est bleu (l'eau), le Fa dièse est bleu sombre (la nuit), le La est blanc (l'air), le La bémol est noir (le néant), le Sol est vert (le végétal), le Do est rouge (le feu), le Ré bémol est brun (la terre) etc... J'ai utilisé ce « code » avec une précision de plus en plus méthodique dans la mise en musique de poèmes (Oscar Wilde, James Joyce, Edgar Poe, William Butler Yeats...) ou d’autres « supports » (peintures, paysages, rêves, danse…)".

Ce premier album sorti le 2 mars 2015 avec le distributeur indépendant l'Autre Distribution marque un aboutissement pour Laura qui parvient à mettre en musique un univers onirique nourrit par de nombreuses influences ainsi que par la maturité de ses compositions...

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