Charles Bukowski, écrivain américain proche de la Beat Generation, jouit d’une réputation sulfureuse qu’il a soigneusement entretenue dans sa vie comme dans ses œuvres. Mais le « vieux dégueulasse » sait aussi être un ami précieux et plein de bons conseils… à sa manière. La preuve en une lettre écrite à son amie Ann Menebroker, une poétesse underground de Sacramento.
"Je suis trop émotif, trop sentimental"
Salut Ann —
Tenez-vous bien, la glue va arriver pour vous soutenir, toi et Wayne.
Bien sûr que j’aimerais te voir mais je ne peux rien te promettre —
pas le sexe pas l’amour et peut-être même pas la compréhension. Mais
j’aimerais te voir. On pourrait prendre des verres et se détendre
et tu pourrais rester aussi longtemps que tu veux. Les choses
sont calmes ici. Il y a des gens qui passent, mais pas trop souvent. Je n’ai
pas de vraies attaches. Il y a une femme qui me dit : « Bukowski,
je ne comprends pas pourquoi tu n’es pas amoureux de moi. Je suis belle. »
« Désolé », je lui dis, « j’ai mis mon levier sur off. »
Je ne sais même pas si je voudrais retourner un jour dans une vraie histoire.
Je suis trop émotif, trop sentimental ; quand le jeu (le jeu difficile que les
hommes et les femmes jouent les uns contre les autres) commence à devenir sérieux, je suis perdu.
Bref, le livre Selected poems a finalement paru, c’est un gros pavé,
et mon nom est sur la couverture donc je suppose que c’est moi qui l’ai écrit.
Essaie de te maintenir et ne te sens pas trop mal, ou alors si tu
te sens trop mal, rappelle toi que ça arrive à chacun de nous. Accroche-toi,
tiens-toi aux putains de murs, et bientôt tu en riras, tu te demanderas même
comment tu as pu laisser ça avoir de l’emprise sur toi.
Tout ce dont on a besoin, c’est du temps — pour progresser, se sentir mieux,
et puis refaire les mêmes erreurs, encore et encore.
Amitiés,
BUK
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