19 mars 2020

16 mars 2020

"Beat Konducta" dans la Note blanche ...

La Note blanche va, une nouvelle fois, envoyer de nombreuses couleurs musicales sur les ondes de Radio Balises ...



Retrouvez le podcast de l'émission en cliquant sur les liens ci-dessous :

Radio Balises:https://radiobalises.com/music/beat-konducta/

Soundcloud:https://soundcloud.com/la-note-blanche/e51s03-la-note-blanche-beat-konducta

Nous commencerons l’émission avec Madlib. Madlib de son vrai nom Otis Jackson Junior est un artiste et créateur californien de hip-hop. Il est très largement influencé par le jazz et notamment par Sun Ra. Madlib est un artiste dont la créativité est explosive. Il sort régulièrement des volumes venant compléter la très riche collection de « Beat Konducta », dont les volumes 3 et 4« Beat Konducta in India ». Dans ces volumes, Madlib rafraîchit des classiques de la musique indienne pour nous livrer une excursion musicale au groove très oriental !

A vos casques, la Note blanche commence ...


Nous resterons dans les sonorités indiennes grâce à l'album : « Bombay the hard way » . Cet album est un mixe de,  je vous le donne en mille, Dj Shadow! Il a pour l'occasion samplé des vieux films indiens des années 70. Et le producteur de cet album est Dan the Automator. Dan the Automator est un producteur de hip hop californien qui s'est notamment occupé du groupe hip-hop Handsome by modeling school. Préparez vous à entendre des titres bien planants qui sont « Shatchidananda » et « Professor Pyarelal » tous deux extraits de l'album « Bombay the hard way » sorti en 1999 sur le label motel. 

Mettons le cap vers l'Inde dans la Note blanche ...


Après les sonorités indiennes de Madlib et Dj Shadow, je filerai dans les couleurs de l'Afrique ! Nous enchainerons avec  « Singwado » de Gyedo Blay Ambolley and the Steneboofs extrait de l'album Ghana Soundz : afrobeat, funk and fusion 70. Ensuite vous aurez « Psychedelic baby » du groupe Futura sekibo provenant du volume 2 de l'album «Nigeria special Modern highlife Afrosounds » sorti en 2007 chez le label Soundway. Voilà pour le début de cette sélection pour la suite ... Je vous laisse la surprise !  

Fermez les yeux et laissez vous porter dans la Note blanche ...


Après ce joli voyage en Afrique, nous voilà prêt pour boucler la boucle du début de l'émission, je vous passerai deux titres hip-hop faisant parti de l'entourage de Madlib.  Nous entendrons « Figaro » de Madvillain. Le titre provient de l'album « Madvillainy » qui le premier du duo musical Madlib et MF Doom. Dans cet album Madlib compose et MF Doom rappe. Celui-ci a été enregistré entre 2002 et 2004 chez le label Strone throw et produit par Madlib lui-même. Et en dernier, nous aurons un morceau de MF Doom : « Dead bent » extrait de l'album « Operation doomsday » sorti en 1999 chez le label Fondle'em. Ce morceau sample provient du  merveilleux titre d'Isaac Hayes « Walk on by » déjà diffusé dans la Note blanche !

Un dernier voyage en musique dans la Note blanche ...


Nous nous retrouvons la semaine prochaine à notre rendez-vous habituel qui est samedi prochain à 17h et mercredi pour la rediffusion de cette émission à 9h sur les ondes de radio balises 99 ! Et si vous voulez toutes les informations sur les titres diffusés et les réécouter autant que faire ce peut, vous pouvez retrouver la page podcast de la note blanche sur http://radiobalises.com/music/beat-konducta/

Retrouvez le podcast de l'émission en cliquant sur les liens ci-dessous :

Radio Balises:https://radiobalises.com/music/beat-konducta/

Soundcloud:https://soundcloud.com/la-note-blanche/e51s03-la-note-blanche-beat-konducta


Playlist :


Générique : « Musicawa » The Daktaris
1 : Indian Hump de Madlib (02’35)
2 : Raw ground wire de Madlib (01’18)
3 : New Bombay (02’12)
4 : Another Getaway (02’34)
5 : Mains titles (01’32)
6 : Variations (02’47)
7 : « Satchidananda » de Dan the Automator (03’07)
8 : « Professor Pyarelal » de Dan the Automator (03’54)
9 : « Singwado «  de Gyedu Blay Ambolley and the steneboofs (04’38)
10 : « Psychedelic baby » de Futura sekibo (03’10)
11 : « Better change your mind » de William Onyeabor (08’24)
12 : « Chant to mother earth » de BLO (06’07)
13 : « Ené alantchi ahorey » de Mulatu Atsake (05’02)
14 : « Figaro » de Madvillain (02’26)
15 : « Dead bent » de MF Doom (02’22)
Générique : « Musicawa » The Daktaris

Emission rédigée et réalisée par La Note blanche

7 mars 2020

Quelques mots sur René Char ...

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« La douleur est le dernier fruit immortel de la jeunesse », lapidaire comme toujours, voici une phrase de René Char. Pour le poète, la jeunesse porte en elle son obscurité et sa flamme. Elle est représentative de cette forme faite plus d’oracles que de véritables poèmes. Elle en fait la grandeur et ses limites. Lire René Char n’apaise pas la soif, elle l’attise, elle ne satisfait pas le désir, elle le fouette, le réveil ! René Char ne nous comble pas, il nous creuse, nous gratte... Chaman autoproclamé il est le derviche tourneur du destin de l’humanité. Il est la figure phare du courage face aux renoncements et au silence complice. Il se veut foudre et tonnerre. Il boxait la vie, "Le poème pulvérisé" il injuriait les tièdes: "La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil". Résistant à toutes les occupations militaires ou intellectuelles il était un bloc de granit monolithique dans ses jugements cassants et définitifs. « Nous sommes allés et nous avons fait face », René Char semble toujours débouler de face, taureau en colère. Il est un orage. Il avait une montagne dans le regard. Poésie sacrificielle du soleil, four à chaux des mots, la poésie de René Char est brûlante...

Blas P. (La Note blanche)



Poèmes et citations :


Toutes les citations suivantes sont extraites des différents livres publiés en Poésie-Gallimard :

"Tu es pressé d’écrire
Comme si tu étais en retard sur la vie
S’il en est ainsi fais cortège à tes sources
Hâte-toi
Hâte toi de transmettre
Ta part de merveilleux de rébellion de bienfaisance
Effectivement tu es en retard sur la vie
La vie inexprimable
La seule enfin qui compte à laquelle tu acceptes de t’unir"
Le Marteau sans maître (1934)


"Vivre, c'est s'obstiner à achever un souvenir.
Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s'habitueront". 
Extrait de Rougeur des matinaux (1950)


"Il faut trembler pour grandir.
L'éternité n'est guère plus longue que la vie".
Feuillets d'Hypnos (1946)


"La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil".
Feuillets d'Hypnos (1946)


"On naît avec les hommes, on meurt inconsolé parmi les dieux".
La Parole en archipel

"Le fruit est aveugle. C’est l’arbre qui voit".
Poèmes en archipel p.175


J'Habite une douleur


"Ne laisse pas le soin de gouverner ton cœur à ces tendresses parentes de l'automne auquel elles empruntent sa placide allure et son affable agonie.
L'œil est précoce à se plisser.
La souffrance connaît peu de mots.
Préfère te coucher sans fardeau ; tu rêveras du lendemain et ton lit te sera léger.
Tu rêveras que ta maison n'a plus de vitres.
Tu es impatient de t'unir au vent, au vent qui parcourt une année en une nuit.
D'autres chanteront l'incorporation mélodieuse, les chairs qui ne personnifient plus que la sorcellerie du sablier.
Tu condamneras la gratitude qui se répète. Plus tard, on t'identifiera à quelque géant désagrégé, seigneur de l'impossible.
Pourtant.
Tu n'as fait qu'augmenter le poids de ta nuit.
Tu es retourné à la pêche aux murailles, à la canicule sans été.
Tu es furieux contre ton amour au centre d'une entente qui s'affole.
Songe à la maison parfaite que tu ne verras jamais monter.
À quand la récolte de l'abîme ?
Mais tu as crevé les yeux du lion.
Tu crois voir passer la beauté au-dessus des lavandes noires…
Qu'est-ce qui t'a hissé une fois encore, un peu plus haut, sans te convaincre ?
Il n'y a pas de siège pur.
Le poème pulvérisé"

Le Poème pulvérisé (1945)

4 mars 2020

"Conference of the birds" en podcast !

La Note blanche a choisi de se laisser aller au gré des différents courants du jazz avec évidemment un peu d'histoire mélangé à nos fameux délices auditifs hebdomadaires...


Ecoutez le podcast de l'émission en cliquant sur les liens ci-dessous:



Commençons par le début en poursuivant notre petite historique du jazz ! Pour cette édition, le jazz s'électrifie avec le courant « Éclectisme et fusion », en gros : le jazz électronique ! Le free jazz n'est qu'un des nombreux courants de jazz qui se développèrent pendant les années soixante. Il existait aussi du jazz-rock, du jazz-funk, et d'autres styles regroupés sous l'étiquette de jazz fusion ou jazz-électronique. L'âge d'or de ces genres s'étendit de la fin des années soixante au début des années soixante-dix. Même si de nombreux fans et critiques considèrent que le jazz-fusion n'est pas à proprement parler du jazz, il en a quand même les principales caractéristiques. Tout d'abord à l'oreille, c'est bien du jazz ! En fait, il n'est pas rare que les musiciens de fusion aient également joué du jazz traditionnel et acoustique avant de passer à l'électrique. 


Nous citerons  pour l'exemple : le trompettiste Miles Davis ! Celui-ci fut le premier jazzman à placer un instrument électronique au cœur de sa musique. Dès 1968, il commença à utiliser des synthétiseur dans son groupe. Puis dans les 70, il compléta son arsenal électronique avec une basse, une guitare et eut même recours à des effets spéciaux pour modifier le son de sa trompette. Sa façon d'enregistrer changea aussi. Traditionnellement, les groupes de jazz jouaient en live sur leurs enregistrements c'est à dire qu'on enregistrait qu'une piste pour tous les musiciens. Avec l'avènement de nouvelles techniques en studio, Miles Davis accorda une grande place au mixage pour modifier, enlever et ajouter certains passages. Il serait certainement plus facile de trouver une permanence pour le jazz à cause des changements dans ses divers avatars "popisants". On sait l'importance du blues dans la pop musique, ce qu'elle lui doit, et comment plus vastement, le jazz a inspiré des groupes tels que Blood, Sweet and Tears ou Chicago Transit Authority formés entre 1967 et 1968. Et enfin, comment en retour, il s'est laissé rythmiquement modifier par eux. Cependant, c'est Miles Davis qui devait en 1969 donner de ses différents échanges de procédés les exemples les plus convaincants. Secoués par les souffles de la New Thing, et cherchant une fois encore à reprendre son essor, le trompettiste s'entoure de jeunes musiciens et multiplie dans son groupe les instruments électrifiés en adoptant une rythmique binaire sophistiquée. Dans l'album « Voodoo Dance » (1969), Miles torture les sons, hache la mélodie, s'engage dans l'aigu puis, dans un mouvement tournoyant et vertigineux, le trompettiste légendaire exploite le chromatisme. Miles Davis comparait d'ailleurs son jeu à celui d'un boxeur en disant : "Je boxe moi-même, et comme je joue : j'épuise ma rage". En d'autres termes, sans l'injustice causé par le racisme, le boxeur n'aurait jamais pris ses gants et Miles sa trompette ! Par la suite, le musicien s'entoure de joueurs de tumbas et de congas. Sa trompette devient elle aussi électrique comme on s'en aperçoit pour la première fois en France au Palais de Chaillot en 1971 où cet homme perpétuellement insatisfait recommence à explorer d'autres sons. Les compagnons qui l'ont suivi depuis quelques années sont Wayne Shorter, Herbie Hancock, Chick Corea, Keith Jarett, John McLaughlin, Billy Cobham, Dave Holland ou encore Tony Williams ! 

C'est parti pour une session électrochoc dans la Note blanche ...


Tous les grands noms des musiciens jazz  vont marquer l'aube des années 70. Ils cheminent dans la voie étroite de ce qu'on a appelé le jazz-rock qui est un genre qui sépare deux mondes : celui de la New Thing et celui du rhythm and blues. Ces "davisiens" ont pour la plupart adopté le rythme binaire, la pop musique et les lourdes machines électroniques de la société technologique. En revanche, beaucoup d'entre eux se tournent vers les sonorités indiennes comme McLaughlin ou vers l'Europe des impressionnistes comme Chick Corea. Afin d'explorer les multiples sons des années 70, j'ai décidé de poursuivre cette l'émission avec le grand et talentueux batteur, Tony Williams. Par conséquent,je resterai sur le même tempo avec le  Tony Williams Lifetime ...

Allumez vos oreilles, fermez les yeux et laissez vous porter par la magie de Tony Williams dans la Note blanche ...


Ensuite, nous passerons à Dave Holland que j'ai déjà mentionné plus haut ! Alors qui est Dave Holland ? Dave Holland est un contrebassiste, bassiste, violoncelliste, et compositeur de jazz anglais Il s'implique dans la scène londonienne des musiques improvisées autour du batteur John Stevens. En 1968, Miles Davis et Philly Joe Jones l'entendent jouer au Ronnie Scott's et Miles propose de l'engager pour remplacer Ron Carter dans son groupe. Son premier enregistrement en tant que membre du groupe de Miles Davis est l'album Filles de Kilimanjaro (avec Davis, Chick Corea, Wayne Shorter et Tony Williams). Il restera membre du groupe jusqu'en 1970 et participe aux albums In a Silent Way et Bitches Brew. À la suite de son départ du groupe de Miles, Dave Holland intègre Circle, groupe d'avant-garde composé de Chick Corea, Barry Altschul et Anthony Braxton, qui marque aussi le début d'une longue collaboration avec le label ECM. Après plusieurs albums, le groupe se dissout peu après le remplacement de Chick Corea par Sam Rivers. Conference of the Birds est le premier album de Dave Holland en tant que leader, le style du disque est différent de ses futurs albums et penche ici nettement vers le free jazz. Celui-ci est d’ailleurs écrit comme une excellente introduction au genre par son habileté à combiner les contrastes, les compositions mélodiques de Holland interprétées dans une approche très libre. 

La musique donne des ailes dans la note blanche, alors préparez vous au décollage ...


Après ce tourbillon de rythmes hypnotiques, nous changerons radicalement de registre et de continent pour  entendre la rage de Seun Kuti qui n'est autre que le fils de Fela Kuti !! Celui-ci a été à bonne école puisqu'il a appris le saxo et le piano dès l'âge de 8 ans. Il commence à jouer comme choriste dans l'orchestre de son père « Egypt 80 » à 9 ans !! Puis il fait ensuite la première partie des spectacles. Seun Kuti prend la relève de son père après son décès en 1997 et dirige actuellement cet orchestre comme chanteur et saxophoniste. Je vais donc vous passer son titre révolutionnaire « Many thing » extrait de l'album éponyme « Many thing » sorti en 2008 sur le label « Tôt ou tard » !! 

Encore et toujours de la transe dans la Note blanche...


Nous continuerons à puiser dans la source nigérienne car vous allez maintenant entendre le batteur et compositeur nigérian : Tony Allen ! Tony Allen a été l'un des pionniers de l'Afrobeat avec son maître et ami Fela Kuti ! Tony Allen était batteur du groupe de Fela ainsi que le directeur artistique de 1968 à 1979! Fela a d'ailleurs déclaré que « sans Tony Allen, il n'y aurait pas d'afrobeat ». Je vais de suite diffuser le titre « No discrimination » qui provient de l'album : « No accommodation for Lagos-no discrimination » sorti en 1978 sur le label Evolver ! 

Beaucoup de musique et surtout pas de discrimination dans la Note blanche ...


Suite à cela, nous partirons au Mali grâce au joueur de Kora, Ballake Sissoko ! Dans le titre « Chameaux », Ballaké est accompagné par le pianiste et compositeur italien Ludivico Einaudi ce qui produit des charmantes mélodies ! Vous pouvez retrouver ce titre dans l'album » Diario Mali » sorti en 2006 sur le label Music development company !

Une petite balade au Mali à dos de chameau dans la Note blanche ...


Après cette petite promenade mélodieuse au Mali, la note blanche s'achève pour aujourd'hui ! Cependant, je vous donne rendez-vous samedi prochain à 17h pour de nouvelles surprises musicales et bien évidemment, mercredi à 11h pour la rediffusion de cette dernière édition ! Enfin, pour les musicovores, rendez-vous sur  https://radiobalises.com/ afin de vous rendre sur la page officielle de la Note blanche qui contient tous les podcasts et toutes les informations sur les titres diffusés !

Playlist:


  • Générique : « Musicawi » The Daktaris
  • Mixe 1 : Miles Davis « Black Satin » (05'21) « Mr Freedom x » (07'12)
  • Mixe 2 : Tony Williams 1)« There comes a time » 2)« Fred » (12'48)
  • Mixe 3 : Dave holland « Conference of the birds » (04'42)
  • Mixe 4 : « Many thing » de Seun Kuti (08'01)
  • Mixe 5: « No discrimination » de Tony Allen (05'59)
  • Mixe 7 : « Chameaux » de Ludivico Einaudi & Ballake Sissoko (03'48)
  • Générique : « Musicawi » The Daktaris

Ecoutez le podcast de l'émission en cliquant sur les liens ci-dessous:




Emission rédigée et réalisée par la Note blanche

27 févr. 2020

Synesthésie et symbolisme :

Le symbolisme apparaît en 1871. Dans l'histoire littéraire, le symbolisme appartient à un mouvement littéraire et poétique français qui, en réaction contre le naturalisme et le Parnasse, s'efforça de fonder l'art sur une vision symbolique spirituelle du monde. Ce mouvement est traduit par des modes d'expressions poétiques nouveaux grâce à des poètes comme Rimbaud, Mallarmé ou Verlaine. Selon une définition de Jean-Paul Sartre : "Le symbolisme découvre l'étroite parenté de la beauté et de la mort". De part son aspect mystérieux et énigmatique, le symbolisme s'épanouit aussi dans la musique. 

D'après Paul Valéry : "Le mot symbolisme fait songer les uns à l'obscurité, à l'étrangeté, à la recherche excessive dans les arts, d'autres y découvrent je ne sais quel spiritualisme esthétique, ou quelle correspondance des choses visibles avec celles qui ne le sont pas"

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Frank Von Stuck : Orphée, 1891


Correspondances

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

II est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
- Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.

Charles Baudelaire


En effet, l'objectif du symbolisme est de rendre visible ce qui est invisible, de faire entrevoir aux lecteurs l'indicible par le biais de l'art. Cette conception artistique engendre très vite un certain idéalisme. Pour les symbolistes, le monde ne saurait se limiter à une apparence concrète réductible à une existence rationnelle. Il est un mystère à déchiffrer dans les "Correspondances" qui frappent d'inanité le cloisonnement des sens : sons, couleurs, visions participent d'une même intuition qui fait du poète une sorte de mage. Le poème des "Correspondances" de Baudelaire constitue donc une sorte de manifeste pour le symbolisme : "La Nature est un temple où (...) les parfums, les couleurs et les sons se répondent".

Dans la littérature, le mouvement du symbolisme trouve donc ses racines dans Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire, le poème Voyelles de Rimbaud. En revanche, l'esthétisme du symbolisme à proprement parler fut développé par Stéphane Mallarmé : Un Coup de dés n’abolira jamais le hasard. L'influence de Mallarmé sera considérable, ce qui entraînera la poésie vers l'hermétisme. En effet, dans l'univers de l'écrivain, le poème devient un monde refermé sur lui-même dont le sens naît de la résonance. C'est en lisant Hegel que Mallarmé à découvert que si le "ciel est mort"", le néant est un point de départ qui conduit au Beau et à l'idéal baudelairien. Le vers se fait donc couleur, musique et s'enrichit de la sensation. Il devient "concours de tous les arts suscitant le miracle". C'est avec Mallarmé que la suggestion devient le fondement de la poétique antiréaliste. Par conséquent, le symbolisme cherche ce qui se dissimule en-dessous du mot, à rendre visible ce qui est invisible. Pour résumé, Mallarmé donnera une tout autre dimension à l'écriture grâce à son Coup de dés, publié en 1897. Dans cette oeuvre phare, l'auteur fait éclater le moule traditionnel du poème. En effet, il invente ou réorganise la poésie dans l'espace et joue non seulement des mots mais aussi de leur typographie. Le poète donne à voir de nouveaux rapports idéographiques et spatiaux faisant de la poésie une partition musicale, plus complexe et plus libre : "Les blancs en effet, assument l'importance (...) pour qui veut lire à haute voix une partition". Ainsi, la musique devient un prolongement de l'art poétique, elle devient un autre langage, elle devient un idéal à atteindre.

Grâce à ce nouveau souffle d'inspiration, la synesthésie des couleurs et des sons se répondent et la fameuse dichotomie de Baudelaire, oscillant entre le spleen et l'idéal, représente la dualité permanente que veut illustrer le symbolisme : le rapport au Moi. Dans les années 1880, l'esthétique symboliste s'étaye à travers une série de manifestes, dont celui de Jean Moréas, et attire une nouvelle génération d'écrivains. Par exemple, la traduction en français par Baudelaire de l'oeuvre d'Edgard Allan Poe a été d'une influence considérable car il fut à l'origine de plusieurs tropes et images du symbolisme. 

Mais qu'est-ce que la synesthésie ? Du grec syn (avec ou union) et aesthesis (sensation), cette figure de style trouve son origine dans un phénomène neurologique par lequel deux ou plusieurs sens sont associés. Grâce à l'épanouissement qu'offre la synesthésie, le symbolisme s'étend à travers les arts comme la peinture, la poésie et la musique.


Voyelles

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,

Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfes d'ombre ; E, candeur des vapeurs et des tentes,

Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,

Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,

Silences traversés des Mondes et des Anges :
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux ! -

A. Rimbaud



Ici, le poète joue avec les mots, les lettres, les couleurs et les sons (bombinent, rire, colère, vibrements, strideurs) en un tableau très coloré déjà précurseur des Illuminations. Les voyelles deviennent des objets avec lesquels on peut s'amuser et qui portent en elles leurs propres réalités, sens et couleurs (naissances latentes). Les couleurs ont une valeur symbolique. Pour le noir, la cruauté, la nuit (puanteur cruelle, golfes d'ombre) ; pour le blanc, la fierté, la pureté, la légèreté ; pour le rouge, le sang, les lèvres, la colère, les excès ; pour le vert, la sérenité et la paix ; pour le bleu, évocation religieuse des cieux (suprême clairon, anges). Et il passe au violet pour l'évocation des yeux de La Femme. Peut-être une allusion à la jeune personne qui l'aurait accompagné à Paris en février 1871, d'après ses amis. Un point de départ à l'idée du poème, un abécédaire qu'il a du avoir entre les mains, comme tout enfant, quand il apprenait à lire. A chaque lettre correspondait une couleur et un certain nombre de mots : A noire, pour Abeille, Araignée, Astre, Arc-en-Ciel. E était jaune pour Emir, Etendard, Esclave, Enclume. I rouge pour Indienne, Injure, Inquisition, Institut. O azur pour Oliphant, Onagre, Ordonnance, Ours. U vert pour Ure, Uniforme, Urne, Uranie et Y orange pour Yeux, Yole, Yeuse, Yatagan. Une autre interprétation, tirée de la biographie de Rimbaud par Pierre Petitfils, et certainement la plus vraisemblable : Le sonnet est le reflet de l'enseignement musical d'Ernest Cabaner : le chromatisme musical ou audition colorée. Il apprenait le piano à Rimbaud, à l'hôtel des Etrangers, lieu de réunion du Cercle Zutique. Cabaner était le barman et Rimbaud a été son assistant au club pendant quelques mois, ce qui lui permettait de dormir sur place. Musicien bohème arrivé à Paris en 1850, Cabaner fréquentait de nombreux peintres dont Cézanne. Il coloriait les notes et leur attribuait le son d'une voyelle. La méthode avait déjà été imaginée pour les débutants par le Père Castel, au XVIIème siècle. Elle ne pouvait qu'intéresser Arthur, à la recherche d'une langue complète et universelle, résumant tout, "parfums, sons, couleurs", telle que décrite dans sa lettre à Paul Demeny du 15 mai 1871.

Peut-on parler d'un art total ? L'impalpable et la volonté de créer un art total qui ferait se correspondre tous les arts en général est une des ambitions essentielles du symbolisme. Par exemple, le poète va chercher dans la musique une autre forme d'écriture poétique. Verlaine prônait "la musique avant tout"  et Mallarmé s'évertuait à composer des partitions de mots dans lesquels la suggestion de l'indicible dominent.


Blas Priscille (La Note blanche)



Un Coup de dés n'abolira jamais le hasard, S. Mallarmé (Préface) : 



"J’aimerais qu’on ne lût pas cette Note ou que parcourue, même on l’oubliât ; elle apprend, au Lecteur habile, peu de chose situé outre sa pénétration : mais, peut troubler l’ingénu devant appliquer un regard aux premiers mots du Poème pour que de suivants, disposés comme ils sont, l’amènent aux derniers, le tout sans nouveauté qu’un espacement de la lecture. Les “blancs”, en effet, assument l’importance, frappent d’abord ; la versification en exigea, comme silence alentour, ordinairement, au point qu’un morceau, lyrique ou de peu de pieds, occupe, au milieu, le tiers environ du feuillet : je ne transgresse cette mesure, seulement la disperse. Le papier intervient chaque fois qu’une image, d’elle-même, cesse ou rentre, acceptant la succession d’autres et, comme il ne s’agit pas, ainsi que toujours, de traits sonores réguliers ou vers — plutôt, de subdivisions prismatiques de l’Idée, l’instant de paraître et que dure leur concours, dans quelque mise en scène spirituelle exacte, c’est à des places variables, près ou loin du fil conducteur latent, en raison de la vraisemblance, que s’impose le texte. L’avantage, si j’ai droit à le dire, littéraire, de cette distance copiée qui mentalement sépare des groupes de mots ou les mots entre eux, semble d’accélérer tantôt et de ralentir le mouvement, le scandant, l’intimant même selon une vision simultanée de la Page : celle-ci prise pour unité comme l’est autre part le Vers ou ligne parfaite. La fiction affleurera et se dissipera, vite, d’après la mobilité de l’écrit, autour des arrêts fragmentaires d’une phrase capitale dès le titre introduite et continuée. Tout se passe, par raccourci, en hypothèse ; on évite le récit. Ajouter que de cet emploi à nu de la pensée avec retraits, prolongements, fuites, ou son dessin même, résulte, pour qui veut lire à haute voix, une partition. La différence des caractères d’imprimerie entre le motif prépondérant, un secondaire et d’adjacents, dicte son importance à l’émission orale et la portée, moyenne, en haut, en bas de page, notera que monte ou descend l’intonation. Seules certaines directions très hardies, des empiètements, etc., formant le contre-point de cette prosodie, demeurent dans une œuvre, qui manque de précédents, à l’état élémentaire : non que j’estime l’opportunité d’essais timides ; mais il ne m’appartient pas, hormis une pagination spéciale ou de volume à moi, dans un Périodique, même valeureux, gracieux et invitant qu’il se montre aux belles libertés, d’agir par trop contrairement à l’usage. J’aurai, toutefois, indiqué du Poème ci-joint, mieux que l’esquisse, un “état” qui ne rompe pas de tous points avec la tradition ; poussé sa présentation en maint sens aussi avant qu’elle n’offusque personne : suffisamment, pour ouvrir des yeux. Aujourd’hui ou sans présumer de l’avenir qui sortira d’ici, rien ou presque un art, reconnaissons aisément que la tentative participe, avec imprévu, de poursuites particulières et chères à notre temps, le vers libre et le poème en prose. Leur réunion s’accomplit sous une influence, je sais, étrangère, celle de la Musique entendue au concert ; on en retrouve plusieurs moyens m’ayant semblé appartenir aux Lettres, je les reprends. Le genre, que c’en devienne un comme la symphonie, peu à peu, à côté du chant personnel, laisse intact l’antique vers, auquel je garde un culte et attribue l’empire de la passion et des rêveries ; tandis que ce serait le cas de traiter, de préférence (ainsi qu’il suit) tels sujets d’imagination pure et complexe ou intellect : que ne reste aucune raison d’exclure de la Poésie — unique source."



Un Coup de dés n'abolira jamais le hasard, S. Mallarmé Fichier PDF



Analogies et correspondances : la synesthésie



Couleurs et figures géométriques. Kandinsky établit une corrélation entre les trois formes géométriques élémentaires et les trois couleurs primaires : triangle jaune, carré rouge, cercle bleu.

Couleurs, nombres et notes. Newton (1704) était convaincu qu'il devait y avoir une correspondance entre les diverses couleurs et les notes de la gamme. Le père Castel, qui s'oppose à lui en tout quant aux couleurs, cherche cependant la même correspondance. Voltaire, dans les Éléments de philosophie de Newton (1738), p. 182, résume : "La plus grande réfrangibilité du violet répond à ré ; la plus grande réfrangibilité du pourpre répond à mi." Violet/ré, pourpre/mi, bleu/fa, vert/sol, jaune/la, orange/si, rouge/do (ut). Voltaire ajoute : "Cette analogie secrète entre la lumière et le son donne lieu de soupçonner que toutes les choses de la nature ont des rapports cachés que peut-être on découvrira quelque jour." Un occultiste du XIXe siècle, maître Philippe de Lyon, soutenait ceci : "Les sons, comme la lumière, sont formés de couleurs qui exercent une grande influence sur l'organisme. Do (rouge) : il excite le cerveau et agit sur l'estomac et les intestins. Ré (orangé) : il agit sur l'estomac, l'abdomen, les intestins... Mi (jaune) : action sur le cœur, la rate. Fa (vert) : il contracte le diaphragme. Sol (bleu) : il agit principalement sur la partie supérieure des organes et sur les bras. La (indigo) : donne des tremblements (cœur et région cardiaque). Si (violet) : elle agit directement sur le cœur lui-même." Dans son livre, Du spirituel dans l'art (1911), Kandinsky justifie les couleurs par leur musique, il assimile les couleurs à des sons. Klee compare les couleurs à des voix.

 

Vassily Kandinsky (1866-1944) : 
Considéré comme l’un des artistes les plus importants du XXe siècle aux côtés notamment de Picasso et de Matisse, il est un des fondateurs de l’art abstrait...



Blas P. (La Note blanche)

13 févr. 2020

"L'Histoire de la musique funk" (Partie 3)

La Note Blanche revient pour entamer le troisième et dernier chapitre sur l'histoire de la musique funk ...


Ecoutez le podcast de l'émission en cliquant sur les liens ci-dessous :



La semaine dernière, nous nous sommes consacrés au groupe P-Funk appelé les Parliament Funkadelic ! De plus, souvenez vous, lors de nos deux épisodes sur la Motown, nous avions aussi eu le plaisir d'écouter deux des plus grandes figures du funk : Stevie Wonder et Marvin Gaye! Par conséquent,  sachez que ces derniers ont influencé de nombreux musiciens qui ont eux mêmes donnés leur propre magie au style du funk. Des groupes fondés à la fin des années 60, comme Kool & The Gang ou encore Earth, Wind and Fire, connaissent alors un succès considérable ! C'est avec ces deux groupes que je vais débuter cette nouvelle session musicale dans ce deuxième chapitre consacré à la musique funk ... Nous commencerons par danser sur « Jungle Boogie » et «Tonight's the Night » qui proviennent de l'album « Very Best-of Kool & The Gang », sorti en 1999 sur le label Island/Mercury. Puis nous enchaînerons avec le groupe démentiel « Earth, Wind & Fire », avec leurs titres « New World Symphony », « African Power » et « Sun Goddess », tous les trois extraits de l'album « Gratitude » sorti en 1999 sur le label Sony ! 

 

Ensuite, nous effectuerons un léger retour en arrière dans le monde du funk car nous pencherons l'oreille sur le grand et talentueux mister Otis Redding ! Sachant tout de même que celui-ci est un incontournable de la soul music ! Après avoir été batteur dans un gospel durant sa jeunesse, Otis Redding commença réellement sa carrière auprès du guitariste virtuose Johnny Jenkins. L'association avec ce guitariste permet à Otis de rencontrer son agent Phil Walden. 


Le chanteur parvient à convaincre la maison de disques grâce à la ballade soul These Arms of Mine, qui permettra au chanteur d'exprimer le trémolo de sa voix avec excès et bien sûr avec succès ! Avec le morceau Mr.Pitful,les choses changent pour Otis. Le titre lui permet en effet de rentrer dans le Top 10 des chansons de rhythm & blues. Selon la légende, Otis l'a surnommé Mr.Pitiful à cause de sa voix mélancolique qui aurait créé cette chanson en quelques minutes avec l'aide de son arrangeur Steve Crooper. En 1965, l'album « Otis Blue » est le plus complet du chanteur car celui-ci comprend le titre Respect qui devint un succès fulgurant grâce à Aretha Franklin, ainsi que Ole Man Trouble et de nombreuses reprises comme Satisfaction des Rolling Stones, ou encore Down in the valley de Solomon Burke ! Suite à une opération de la gorge, Redding peut à nouveau rechanter. Au mélancolique Fa-fa-fa-fa-fa, qui symbolise les années « Pitiful »Otis donne un mélange de genres étonnant qui voulait reprendre beaucoup de ses chansons en accélérant les ballades et en bridant ses chansons endiablées. Malheureusement, il n'en aura pas le temps car le 10 décembre 1967, l'avion personnel d'Otis Redding s'écrase dans un lac du Wisconsin. De nombreux tubes sortiront après sa mort, comme Match Game et bien sûr (Sittin'on) The Dock of the Bay. Si cette chanson est aujourd'hui celle que le grand public associe le plus volontiers au nom d'Otis Redding, ce n'est pas seulement à cause de la mort tragique de l'auteur survenue quelques jours après son enregistrement. Mais pour beaucoup, il s'agit d'un virage pop qu'aurait pu prendre la carrière de l'artiste au sommet de sa gloire ...


Je terminerai cette émission avec des voix féminines ! Pendant que les hommes chantent l'amour, les femmes elles, instaurent le respect ! Tout comme Aretha Franklin avec son fameux titre « Respect », extrait de l'album « I never loved a man the way I love you » sorti en 1967, chez le label Rhino. Puis vous entendrez la célèbre diva Linda Tillery, avec son hit « I'll say it again » extrait de l'album éponyme « I'll fly away » sorti en 2006 chez le label EarthBeat Records ! Enfin pour dernier titre vous aurez le privilège d'entendre les sublimes vocalises de la chanteuse Marva Whitney avec le morceau « Things got to get better » sorti en 1973 chez le label King Records ! 

Faites vos derniers pas de danse et défoulez grâce à la Note Blanche ...


C'est malheureusement sur ces belles voix féminines que la Note blanche se doit de mettre un terme à cette émission! Cependant, je vous donne rendez-vous samedi prochain à 17h pour de nouvelles aventures en musique, et bien évidemment, mercredi à 11h pour la rediffusion de cette dernière édition ! Enfin, pour les musicophages, rendez-vous sur  https://radiobalises.com/ afin de vous rendre sur la page officielle de la Note blanche qui contient tous les podcasts et toutes les informations sur les titres diffusés !

Playlist : 


  • Générique : « Musicawi » The Daktaris
  • Mixe 1 : « Jungle Boogie » et « Tonight's the Night »,de  Kool & The Gang / « New World Symphony », « African Power » et « Sun Goddess », d' Earth, Wind & Fire  (22'17)
  • Mixe 2 : Otis Redding : 1)«Otis, Intro »2)« Try a little tenderness »3)« Mr Pitiful » 4) « Respect » 5)« I can't get no satisfaction »6)« Stand by me » 7)« Hard to handle ! »(23'01)
  • Mixe 3 : « Respect » d' Aretha Franklin « I'll say it again » de  Linda Tillery et « Things got to get better » de  Marva Whitney (10'27)
  • Générique : « Things got to get better » de  Marva Whitney

Ecoutez le podcast de l'émission en cliquant sur les liens ci-dessous :



Emission rédigée et réalisée par La Note blanche

10 févr. 2020

"Substance mort", Philip K. Dick

Résumé :


Dans une Amérique imaginaire livrée à l'effacement des singularités et à la paranoïa technologique, les derniers survivants de la contre-culture des années 60 achèvent de brûler leur cerveau au moyen de la plus redoutable des drogues, la Substance Mort. Dans cette Amérique plus vraie que nature, Fred, qui travaille incognito pour la brigade des stups, le corps dissimulé sous un « complet brouillé », est chargé par ses supérieurs d'espionner Bob Arctor, un toxicomane qui n'est autre que lui-même. Un voyage sans retour au bout de la schizophrénie, une plongée glaçante dans l'enfer des paradis artificiels.



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Philip K. Dick (1928-1982) a laissé une œuvre considérable, qui a profondément marqué toute une génération d'auteurs et de lecteurs. Après Le Maître du Haut-Château,Ubik ou Blade Runner, Simulacres, etc. Il livra avec Substance Mort son œuvre la plus personnelle, la plus désespérément aboutie.

Titre original : A Scanner darkly, 1977
Science Fiction - Traduction de Robert Louit
Edition : GALLIMARD, coll. Folio SF 
Autres éditions : 
DENOËL :  1978, 1979, 1988, 1997, 1999
GALLIMARD :  2006, 2007


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Substance Mort de Philip K. Dick par la Note blanche (article) : 


« Ce roman ne propose aucune morale; il n’est pas bourgeois; il ne prétend pas que ses héros ont eu tort de jouer au lieu de travailler dur; il se contente d’énumérer les conséquences. » (p. 394)

Cette phrase qui termine le roman aurait tout aussi bien pu le débuter. Comme le dit si bien la couverture, « N’espérez pas de happy end ». En effet, il n’y en aura pas. Pour autant, ce roman n’est pas déprimant, il est d'une lucidité implacable . En effet, l'auteur recrée une réalité parfois dure, parfois délirante, parfois interpellante et criante de vérité.  Dick arrive à recréer un univers hanté par la drogue, clairement compréhensible pour ceux qui ne lui sont pas familiers et apparemment assez vraisemblable, pour ceux qui le sont. Comme une sorte de pont entre deux mondes, entre folie et raison, entre fuite en avant et vie quotidienne...


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Nous suivons ici le quotidien d’un agent infiltré dans un groupe de drogués, Fred/Bob Arctor. Celui-ci n’arrive plus à savoir qui de Fred ou de Bob est le vrai lui. Il se laisse peu à peu ravager par la drogue, la Substance Mort, qu’il est obligé de consommer pour être crédible. Le quotidien de Fred/Bob est partagé entre ses délires sans queue ni tête avec sa bande d’amis et ses rapports dans le monde aseptisé et hors de tout de la Loi. Lorsqu’il est Fred, le flic, il n’a pas de réelle identité. Il porte en permanence une combinaison qui brouille son aspect, et est obligé de faire des rapports sur lui-même pour ne pas griller sa couverture. Lorsqu’il est Bob Arctor, il est juste un « looser » qui a un énorme béguin pour une fille, Donna, qui ne veut pas lui céder et qui ne sait plus trop ce qu’il fait, si ce n’est chercher sa prochaine dose de Substance Mort. Et pourtant sa vie en tant que Bob semble bien plus consistance que celle en tant que Fred…

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« Robert Arctor s’interrompit. Les contempla, les straights dans leurs costumes de poussahs, leurs chaussures de poussahs, leurs cravates de poussahs. Il songea, la Substance M ne risque pas de leur détruire le cerveau; ils n’en ont pas. » (p. 40)

Ici, les « straights »- comprendre les gens qui marchent droit, les non-drogués – semblent n’être que des moutons juste bons à s’épanouir dans les nombreux temples du nouveau Dieu américain : la Consommation. La vie de straight semble ne pas avoir de sens, parce que privée de l’intensité de celle du junky. Et pourtant, le junky ne fait que courir droit au mur qui causera sa perte. C’est qu’il n’y a pas de bonne solution dans ce monde. Dick montre ici un pessimisme encore plus prégnant que dans ses autres livres. On sent derrière les dialogues, derrière les personnages, derrières les faits divers qui parsèment le récit, une forme de vécu qui rend le tout plus intense. L'écrivain ne se prive pas non plus d’égratigner la société là où ça fait mal, c’est-à-dire là où il semble n’y avoir aucune solution. Comme ici par exemple:

« Il faut posséder la plus haute forme de sagesse, songea-t-elle, pour savoir quand on doit recourir à l’injustice. Comment la justice peut-elle jamais devenir victime du droit? Comment ça peut arriver? C’est qu’une malédiction pèse sur ce monde et j’en ai la preuve sous les yeux. Quelque part, au niveau le plus profond, le mécanisme, le tissu des choses a craqué, et des lambeaux épars est né ce besoin qui nous pousse aux injustices les plus troubles au nom du choix le plus sage. » (p. 339)

L'auteur porte en fait un regard lucide sur ce qui a fait partie de sa vie pendant un certain temps, la drogue. On sent le recul, mais on sent également les méandres vertigineux de la paranoïa, la douleur toujours présente et une infinie tendresse amère pour ces personnes qui se retrouvent piégées dans un monde qui leur fera payer trop cher leurs erreurs… Des erreurs volontaires ou involontaires ?

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« L’abus de drogues n’est pas une maladie; c’est une décision, au même titre que la décision de traverser la rue devant une voiture lancée à vive allure. On n’appelle pas cela une maladie, mais une erreur de jugement. Et quand un certain nombre de gens s’y mettent, cela devient un style de vie – dont la devise, dans le cas présent, serait: « Prends du bonheur maintenant parce que demain tu seras mort. » Seulement la mort commence à vous ronger presque aussitôt, et le bonheur n’est plus qu’un souvenir. » (p. 394)

"On n’appelle pas cela une maladie, mais une erreur de jugement".  Je trouve cette phrase magistrale, parce qu’elle permet de mieux percevoir cet univers, de mieux cerner les gens qui ont plongé dans la substance, parfois malgré eux. Dans un monde climatisé, où tout paraît fade et désuet, la Substance Mort arrive comme un miracle. Cependant, dans ce roman, des conséquences plus graves, et démesurées surviennent...cette substance n'étant qu'une pure machinerie du gouvernement, n'est en fait qu'un piège qui délivre faussement les personnages de leur vie afin de mieux les enfermer dans la société. Sacré paradoxe, n'est-ce pas ? Le junkie pense s'émanciper de la société grâce à la Substance M. alors qu'il n'est que le "produit" d'une machination directement liée à cette dernière.

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Au final, Substance Mort est une oeuvre déroutante et pourtant très limpide, dure mais qui se lit d’une seule traite, pessimiste mais surprenante . Un livre fort, qui permet de découvrir une nouvelle facette de l’auteur, un peu plus humaine que celles qu’il nous livre habituellement. Voici ses propres mots: « Pour ma part, je ne suis pas un personnage du roman; je suis le roman. » (p. 395)


Blas Priscille (La Note blanche)



A Scanner Darkly, le film, bande-annonce :


A Scanner Darkly, un film américain adapté du roman Substance Mort de Philip K. Dick et réalisé par Richard Linklater, est sorti en 2006. 

Avec Keanu Reeves, Winona Ryder et Robert Jr Downey.





A Scanner Darkly, soundtrack :

 






A lire "Substance Mort et le cinéma comme rêve de résurrection"  :


"Substance Mort et le cinéma comme rêve de résurrection"

Extrait  :


Dans Substance Mort (roman paru en 1977) en particulier, Philip K. Dick met en scène l’espoir d’une révélation par l’image : un être transcendant doit permettre de définir ce qu’est le réel, et par là même déjouer la mort, par l’inversion du cours du temps grâce au cinéma.

Pour André Bazin, la photographie lave l’homme du péché de connaissance, la perspective, révélant enfin le référent : l’image ne se substitue plus au monde. « Comme le christ est venu restaurer l’image dégradée de l’homme après le péché d’Adam et Ève, écrit Luc Vancheri à propos de Bazin, Niepce et Lumière sont venus racheter le péché de connaissance des premiers peintres de la Renaissance qui ont désiré goûter au fruit défendu de la peinture, la perspective. » (Luc Vancheri, Cinéma et peinture, Paris, Éditions Armand Colin, Collection « Armand Colin Cinéma », 2007, p. 49). Ainsi le cinéma est porteur de la promesse d’une révélation du réel qui mettra fin au brouillard où les êtres errent, révélation qui, comme dans le Nouveau Testament, s’accompagnera d’une résurrection des morts.


Dans un passage très émouvant où Charles Freck imagine la résurrection de tous ces amis et idoles victimes de la drogue, dont Janis Joplin (photo ci-dessous). Le rêve de Charles Freck prend la forme de la représentation du paradis et de son pendant cinématographique conventionnel, le happy end : "Tous, même ceux qui étaient morts ou complètement cramés, comme Jerry Fabin. Ils se trouvaient tous là, baignés par une belle lumière blanche qui n’était pas celle du jour, mais plus belle encore, comme une mer qui s’étendait sous eux mais qui les recouvrait aussi". (Substance Mort, Paris, Éditions Denoël, collection « Folio SF », traduction de Robert Louit, 2000, p. 190).

LienArticle:http://www.eclatsfuturs.com/post/73222211019/substance-mort-le-cin%C3%A9ma-comme-r%C3%AAve-de

ScannerDarkly,filmstreaming(lien):http://streamay.com/3747-a-scanner-darkly.html